Cette semaine, nous vous proposons de découvrir les disciplines proposées par l’EPN Bâtiment et énergie (tout ce qui concerne le BTP et les travaux publics, mais pas seulement). On y dispense aussi des formations en énergétique, génie nucléaire et génie des procédés au plus près des besoins de terrain. Jean-Sébastien Villefort, professeur titulaire de la chaire Construction durable et directeur de l’équipe, répond à nos questions pour éclairer vos futurs choix de formation.
Vous dirigez l'équipe pédagogique nationale Bâtiment et énergie du Cnam. Celle-ci renferme plusieurs thématiques industrielles: BTP, énergétique, génie des procédés et ingénierie pharmaceutique, nucléaire. Pourriez-vous définir chacun de ses domaines pour bien en comprendre la finalité?
L’équipe Bâtiment et énergie est un assemblage de chaires que l’on peut regrouper sous deux grands domaines de l’économie française: le BTP d’une part, et l’énergie d’autre part. Un travail important a été réalisé depuis dix ans sur le BTP pour créer une offre de formation cohérente permettant de satisfaire à la majorité des besoins de la profession dans tous les métiers, de technicien supérieur à ingénieur.
L’énergie, pour sa part, regroupe différents métiers comme le génie climatique, les moteurs, le nucléaire et le génie des procédés. Si les premiers secteurs sont bien connus du grand public, le génie des procédés reste plus confidentiel. Il se situe à la convergence de plusieurs disciplines et étudie principalement les transferts de la matière, de l'énergie et de la quantité de mouvement pour établir des lois et des corrélations utilisables lors de la transposition industrielle.
Le Cnam est reconnu pour concilier enseignements théoriques et pratiques, et ainsi coller au plus près des besoins de terrain. Comment opérez-vous dans votre équipe pour proposer des formations qui répondent aux besoins des industriels? Via quelles coopérations extérieures aussi?
Ce subtil équilibre entre théorie et pratique, nous le devons avant tout à un corps enseignant riche et diversifié, des titulaires de chaires et des universitaires d’une part, des professeurs associés, et des chargés de cours en activé dans le secteur industriel d’autre part. L’offre est pilotée par un conseil d’orientation que nous réunissons tous les cinq ans avant chaque accréditation HCERES (Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur) et CTI (Commission des titres d’ingénieur) pour définir les grands axes de développement, mais également de régénération de l’offre. L’amélioration continue et les expérimentations sont pilotées sur le terrain par des conseils de perfectionnement de site associant l’ensemble des acteurs (élèves, enseignants, centres Cnam régionaux, partenaires dont CFA, entreprises et fédérations professionnelles).
Ces conseils de site font l’objet d’une synthèse lors du conseil de perfectionnement national annuel. Il faut également ajouter le conseil de l’équipe pédagogique nationale pour la mise en cohérence de l’offre et l’arbitrage des ressources, mais également les instances du Cnam qui ont le pouvoir de réguler ou d’impulser de nouveaux projets. L’équipe Bâtiment et énergie a ainsi contribué dans son domaine professionnel au développement du Bac+1, de l’apprentissage sur l’ensemble du territoire métropolitain et ultramarin, de l’offre CPF, de la formation à distance et des formations à l’étranger (Liban, Côte d’ivoire, Maroc, Madagascar).
Le monde évolue, les techniques aussi: quelles sont les innovations en cours ou à attendre dans les filières qui sont les vôtres? Et quels cursus nouveaux sont susceptibles d'apparaître pour y répondre?
La chaire de BTP a restructuré son offre en 2018 pour répondre au défi des transitions numérique et environnementale dans l’ensemble des métiers de cadre et d’ingénieur. Nous sommes désormais dans une phase de consolidation et perfectionnement de l’offre.
Le secteur de l’énergie est plus morcelé, et nous avons pour objectif d’apporter une réponse plus transversale sur l’ensemble de ces métiers pour permettre une réponse pertinente aux grands enjeux énergétiques d’aujourd’hui et de demain. À ce propos, une chaire Hydrogène et énergie décarbonée verra prochainement le jour. Nous poussons également à la création d’une chaire Installations nucléaires pour former des cadres aptes à gérer la sécurité, la maintenance et la déconstruction des installations existantes, mais également capables d’accompagner le renouvellement du parc pour assurer la transition à terme vers des énergies plus vertueuses. Nous envisageons par ailleurs un rapprochement avec l’équipe Systèmes électriques pour offrir une offre plus large et plus lisible sur les niveaux licence et ingénieur en alternance et en partenariat, et bien sûr en formation hors temps de travail à distance car telle est notre raison d’être.
Enfin, question plus large, comment voyez-vous l'évolution de la formation professionnelle à horizon 10 ou 20 ans? Ce sera quoi, la formation de demain? Ils seront comment, les élèves de demain?
Dans dix ans, l’élève ne sera ni tout à fait le même, ni tout à fait un autre. En tant que praticien, je pense que la formation continue poursuivra son développement sous forme hybride, avec du matériel pédagogique plus abouti et des outils plus sophistiqués, et complétée par des face-à-face pédagogiques plus courts mais plus fréquents avec des enseignants, en distanciel et en présentiel. Si notre équipe pédagogique est engagée, sous l’impulsion des sciences nucléaires, dans plusieurs projets de développement d’outils de simulation, de réalité virtuelle/augmentée/mixte et de jumeaux numériques, je ne crois pas à la totale efficacité pédagogique d’un métaverse (univers parallèle ou alternatif) de la formation professionnelle. Si tel était le cas un jour, je devrai m’adapter… ou changer de métier! J’ai toujours rêvé d’être apiculteur dans les Cévennes… (sourire)