École des transitions écologiques (épisode 2/2)

Premier anniversaire de l’école : bilan côté auditeurs

4 novembre 2024

© Vignette : Engin Akyurt (Unsplash).
L’École des transitions écologiques du Cnam, lancée il y a un an en même temps que l’École de l’énergie, entame sa deuxième année académique. Son offre de formation, via ses 35 parcours et sa cinquantaine d’unités d’enseignement, est multidisciplinaire. De l’agroalimentaire au BTP, de la finance d'entreprise à la culture, de la santé au management : plus de 30 domaines liés de près ou de loin au développement durable, question décisive de notre époque.

Après avoir donné la parole à Lucie Marinier, préfiguratrice de l’École des transitions écologiques, qui a fait le bilan de cette première année, place à trois auditeurs qui sont en formation au sein de l’école ou suivent des unités d’enseignement (UE) directement rattachées à elle.

Nicolas Enzweiler, auditeur au CnamNicolas Enzweiler est informaticien depuis 20 ans. Il prépare au Cnam un diplôme d'ingénieur dans la même discipline pour aller au-delà de sa licence, se perfectionner et sortir de sa « zone de confort ». Il lui reste encore plusieurs années d'efforts pour valider son diplôme, préférant aller à son rythme pour mieux garantir sa réussite.

Votre diplôme d’ingénieur ne fait pas partie à proprement parler de l’offre de l’École des transitions écologiques, mais vous avez choisi de suivre deux unités d’enseignement optionnelles sur la thématique : quelles sont-elles et pourquoi les avoir suivies ?

J’ai suivi HSE133 (Enjeux des transitions écologiques : comprendre et agir), car je sentais que les informations qui me parvenaient au sujet de la situation environnementale et de son évolution étaient très subjectives ou imprécises. Je voulais donc approcher le sujet de façon plus rigoureuse. Cette unité d’enseignement a non seulement comblé mon souhait, mais elle m’a également sensibilisé à de nombreux autres domaines. Elle ne dresse pas uniquement le tableau de la situation actuelle, mais permet aussi de comprendre les leviers d’action dont nous disposons, et qui peuvent faire la différence pour limiter la crise écologique en cours. De ce fait, je n’ai donc pas hésité à continuer l’aventure avec HSE134 (Intégrer les enjeux de transitions écologiques dans les pratiques professionnelles), qui m’a permis de comprendre plus concrètement comment les organisations peuvent agir sur cette question et quelles sont les spécificités des différents secteurs.

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En quoi est-ce important, pour un informaticien, d’intégrer dans sa pratique les enjeux liés aux transitions écologiques ?

À ce jour, les limites environnementales sont globalement peu prises en compte dans le secteur numérique, qui est pourtant l’un des secteurs dont les émissions de gaz à effet de serre croissent le plus rapidement. Par ailleurs, les conséquences attendues de la crise écologique sont telles qu’il sera inévitable de changer les pratiques, peut-être dans un contexte d’urgence. Ainsi, si les possibilités d’agir aujourd’hui paraissent limitées (la justification environnementale constituant rarement un argument décisif à elle seule), disposer des connaissances nécessaires à une action efficace dans les technologies de l’information est très pertinent à moyen et long terme. Et à court terme, cela permet au moins d’identifier les situations dans lesquelles la logique économique et la préservation d’un environnement viable convergent, afin d’être en mesure d’insister sur ces co-bénéfices dans les débats.

Quelles sont vos attentes une fois que vous aurez obtenu votre diplôme d’ingénieur ?

Le diplôme d'ingénieur en Architecture et intégration des systèmes et des logiciels devrait me permettre d'accéder à des responsabilités d'architecte et pourrait également m'ouvrir l'accès aux études post-master.

Béatrice RocheBéatrice Roche est conservatrice du patrimoine dans le Gard et a exercé comme directrice de musées pendant 15 ans. Souhaitant s'engager activement dans la transition du secteur muséal, elle s’est inscrite dans deux cursus au Cnam : le certificat de spécialisation « Ingénierie de la culture et de la création » (qu’elle finalisera cette année) et le certificat de compétence « Les transitions écologiques dans les pratiques professionnelles ».

Vous suivez deux certificats au Cnam qui sont adossés à l’École des transitions écologiques : est-ce que la création de cette école, au moment de votre inscription il y a un an, a rendu les choses plus lisibles pour vous ?

En effet, j’ai trouvé dans l’École des transitions écologiques deux formations qui correspondaient à mes besoins : à la fois acquérir des connaissances fondamentales sur les problématiques environnementales et prendre du recul sur ma pratique professionnelle en bénéficiant d’une formation axée sur les nouveaux enjeux et mutations du secteur culturel. À ce titre, le certificat de spécialisation « Ingénierie de la culture et de la création », piloté par Lucie Marinier, par la qualité des enseignements et les rencontres avec des professionnels très inspirants, a parfaitement répondu à mes attentes, tout en me permettant de développer un solide réseau. Par ailleurs, avec l’approche pluridisciplinaire et multisectorielle du certificat de compétence « Les transitions écologiques dans les pratiques professionnelles », je me sens aujourd’hui bien mieux outillée pour envisager mon activité professionnelle différemment et poursuivre mon engagement citoyen.  

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En quoi est-ce important, dans votre domaine, d’intégrer dans sa pratique les enjeux liés aux transitions écologiques ?

Aucun secteur professionnel aujourd’hui ne peut ignorer le contexte de changement auquel nous devons faire face et sa responsabilité à s’engager dans un nouveau modèle de société plus sobre. Le secteur culturel (les professionnels avant même les tutelles) a pris la mesure de cette urgence en se mettant en ordre de marche depuis plusieurs années. Il reste évidemment beaucoup à faire, mais les expérimentations en matière de ralentissement et de limitation des ressources et des impacts ainsi que le développement des formations idoines sont très encourageants. En tant que professionnelle engagée, je souhaite prendre une part active à ce changement, et faire en sorte que le secteur culturel trouve et mette en place des solutions d’adaptation et d’atténuation à la hauteur des enjeux socio-écologiques.

Vous avez été directrice de musées, vous êtes actuellement conservatrice du patrimoine : quelle sera la prochaine étape après avoir obtenu vos deux certificats au Cnam ?

À la fois, revenir à des responsabilités opérationnelles de direction d’établissement, en mettant en œuvre les acquis et les nouvelles pratiques pour une gestion plus écoresponsable (écoconception des expositions, nouvelles formes de programmation culturelle, nouveaux modèles de collaboration, etc.), et en intégrant ces orientations au cœur des missions fondamentales du musée. Et dans le même temps poursuivre mon implication dans cette dynamique collective au travers de mes engagements associatifs et personnels pour continuer à prendre part à cette réflexion collective, imaginer des solutions alternatives et les partager avec l’ensemble du secteur culturel.

Freddy Tettart, auditeur au CnamFreddy Tettart travaille dans le domaine de l’électricité et est en semi-reconversion. Après avoir obtenu sa licence Énergie et développement durable au Cnam en 2022, il a enchaîné avec le cycle d’ingénieur Énergie et environnement dans l'industrie et les transports. La plupart des unités d’enseignement de ce diplôme étant communes à sa licence, il ne lui reste plus que 5 unités d’enseignement (UE) à valider pour décrocher le précieux sésame.

Vous avez entamé votre cycle d’ingénieur au moment où l’École des transitions écologiques, dont fait partie votre formation, ouvrait. Est-ce que la création de cette école a rendu les choses plus lisibles pour vous ?

À vrai dire, depuis mes débuts au Cnam en 2019, j’ai spontanément choisi des unités d’enseignement sur l’environnement telles que « Enjeux des transitions écologiques : comprendre et agir » (HSE133) et « Intégrer les enjeux de transitions écologiques dans les pratiques professionnelles » (HSE134). J’ai également opté pour deux autres unités d’enseignement (UE) : « Efficacité énergétique des procédés et valorisation des rejets de chaleur fatale dans l'industrie : technologies et méthodes d'intégration » (ENF116) et « Modélisation des systèmes énergétiques pour une mobilité décarbonée » (ENM109). On parle ici d’énergie sobre et réduite (la meilleure des énergies est celle qu’on ne dépense pas, dit l’adage) comme l’exploitation des rejets de chaleur industriels ou l’usage de la marche à pied, du vélo ou du bus électrique, par exemple, pour se déplacer. Que ces UE soient regroupées et catégorisées au sein des plateformes des écoles des transitions écologiques et de l’énergie renforce selon moi leur identité et en facilite l’accès. Plus clair et attrayant pour qui cherche des cours liés directement ou indirectement à l’écologie et au développement durable.

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En quoi est-ce important, dans votre domaine, d’intégrer dans sa pratique les enjeux liés aux transitions écologiques ?

Pléonasme ou lapalissade, l’énergie est le carburant de notre civilisation. Toute production et consommation d'énergie, surtout émanant d’énergies fossiles, génère ce fameux gaz carbonique et autres polluants qui mobilisent beaucoup de ressources et donc d'énergie. Ici, à Dunkerque, se concentrent 21% des émissions industrielles de CO2 en France par, notamment, l’industrie lourde, la sidérurgie et l’immense port maritime. C’est aussi la plus grande plateforme énergétique en Europe. D’où des projets de décarbonation par stockage de CO2 chez Mittal, d’une filière hydrogène, d’une autoroute « de chaleur fatale » de 55 kilomètres, d’une usine géante de batteries ou encore de l’installation d’une cinquantaine d’éoliennes au large.

Vous dites que vous êtes en semi-reconversion : pouvez-vous nous dire ce que vous comptez faire après avoir obtenu votre diplôme d’ingénieur ?

Je ne suis qu’un modeste électricien errant de CDD en intérim, dans des conditions assez rudes ou il faut parfois ramper sous un plancher ou dans des combles. À plus de 50 ans, j’ai encore assez d’espoir et d’ambition pour croire que ce diplôme sera un catalyseur et un ascenseur social, quitte à changer de région. Je cherche dans l’énergétique responsable et sobre sans « greenwashing » (ou écoblanchiment, qui désigne une communication utilisant de façon abusive l'argument écologique). Non pas pour me sentir héroïque et fier de moi mais, autant que de mon propre sort, je suis soucieux des ravages du changement climatique sur la nature depuis les années 90. Je crois aux solutions bioclimatiques, biomimétiques et basse technologie autant que me font rêver les grands projets high-tech ou futuristes supposant une énergie infinie et verte comme la fusion nucléaire encore expérimentale ou l'énergie noire encore méconnue.