S’envoler avec le Cnam !
2 décembre 2024
La réalité virtuelle transforme la formation professionnelle en offrant des environnements simulés réalistes où les apprenants peuvent développer des compétences pratiques sans les risques et les coûts du monde réel. Elle est particulièrement bénéfique pour les industries à haut risque comme l’aviation, entre autres, où les simulations permettent de s’entraîner en toute sécurité.
Pourquoi un avion léger comme jumeau numérique ?
Ce projet, porté par la direction nationale des usages du numérique (DN1) sous la direction de Sophie Guichard, vise à repousser les limites des apprentissages traditionnels. Les jumeaux numériques développés au Cnam offrent aux enseignants et apprenants des modules interactifs et engageants, rendant possible une exploration bien au-delà des moyens matériels classiques. Grâce à ces outils, la DN1 accompagne les enseignants dans la numérisation de leurs ressources pédagogiques, transformant ainsi des concepts complexes en expériences immersives.
Le nouveau jumeau numérique en cours de développement à la DN1 est en fait triple. L’avion numérique, un Zenair CH 601 UL, se décompose en trois jumeaux distincts : une visite virtuelle de l’avion dans son hangar, un jumeau sur la thématique de l’aérodynamique dans une soufflerie virtuelle, et un dernier sur la thématique de la mécanique des structures. Il est à noter que le jumeau numérique de l'aérodynamisme permet au Cnam de jouer dans la cour des grands. En effet, seuls la Nasa, Boeing, Airbus, Ariane Espace et Tesla sont capables à ce jour de représenter en réalité virtuelle les écoulements d'air comme peut le faire le Conservatoire.
Les fonctions pédagogiques de l’avion léger virtuel
Les développements des jumeaux numériques autour de l’avion léger ont commencé il y a plus d’un an et demi. Leurs visées pédagogiques sont très différentes des modules créés pour le département de chimie, très opérationnels (ex. expérience en laboratoire). Ici, on est dans la recherche fondamentale hautement avancée. Chaque jumeau numérique de l’avion virtuel a ses spécificités et ses techniques propres, mais un but commun : simuler les phénomènes de l’air et de la matière, les analyser, et former le regard des apprenants.
Jumeau numérique : l’avion dans son hangar
L'avion léger virtuel, le Zenair, dans son hangar
La visite du hangar est une découverte de l’aviation en général et de l’avion léger lui-même. Cette visite permet de découvrir l’histoire de l’aviation à travers des objets posés sur des établis (gyroscope, moteur à pistons) ainsi que la géométrie invisible de l’avion, sa structure externe et interne : qu’est-ce qu’une corde ? Une flèche ? Le dièdre d’une aile ? Il s’agit ici de se familiariser avec l’environnement d’un avion pour comprendre sa structure, le réparer le cas échéant, et répondre à ses besoins techniques pour qu’il puisse voler en toute sécurité. Ce jumeau numérique est le module le plus grand public des trois jumeaux du Zenair.
Jumeau numérique : aérodynamique dans une soufflerie virtuelle
Soufflerie + écoulement virtuel de l'air
C’est de loin le jumeau numérique le plus complexe à développer, car cela n’a jamais été fait au monde en réalité virtuelle dans le cadre universitaire. Le travail des chercheurs de l’équipe du laboratoire DynFluid du Cnam est à ce titre exceptionnel.
Pour la partie aérodynamique, la problématique est la suivante : les outils pédagogiques actuellement utilisés dans les formations en aérodynamique sont principalement de deux types. Les outils expérimentaux (type soufflerie et banc d’essai) permettent la mise en évidence rapide des phénomènes aérodynamiques importants à travers l’exploitation de données issues de capteurs. Mais leur utilisation pédagogique peut s’avérer lourde à mettre en place et les moyens de visualisation directe des écoulements sont très imparfaits, voire inexistants.
D’autre part, les outils numériques utilisant des logiciels de simulation permettent une visualisation plus complète des écoulements, mais les temps de restitution et la prise en main des logiciels nécessitent souvent de nombreuses itérations entre l’apprenant et l’enseignant. Ces délais contribuent souvent à brouiller le discours pédagogique voulant se focaliser sur l’identification et la compréhension des phénomènes importants. Dès lors, il devient intéressant de vouloir associer les aspects de visualisation directe apportés par la simulation aux aspects interactifs et rapides apportés par l’expérimental. Ainsi, la création d’un laboratoire virtuel de mécanique des fluides consiste à combiner l’environnement immersif et interactif de la réalité virtuelle avec des outils de simulation numérique précis et rapides permettant la simulation et l’interaction avec un écoulement d’air virtuel autour d’un avion virtuel. Il devient alors possible de visualiser et donc de comprendre en interagissant en temps réel avec l’écoulement d’air responsable des phénomènes aérodynamiques intervenant dans la conception d’un avion. Pour les apprenants, le bénéfice est de pouvoir librement tester, en temps réel, les effets de modification de formes aérodynamiques sur les quantités d’intérêt pour l’ingénieur, et ainsi de mieux comprendre les solutions technologiques appliquées dans l’industrie.
Jumeau numérique : mécanique des structures de l’aile
Mécanique des structures de l'air
Le but est d’offrir aux apprenants des travaux pratiques de mécanique des structures dans un environnement immersif basés sur l'aile de l’avion léger. D’un point de vue pédagogique, ces travaux pratiques ont vocation à confronter les résultats expérimentaux à ceux issus des modèles mathématiques à fort contenu mécanique : ceci oblige l’apprenant à prendre du recul sur les résultats des modèles. Dans un premier temps, le jumeau numérique sera l’étude statique de l’aile de l’avion léger via des jauges de déformation, et des comparateurs seront réalisés.
Ici, l’apprenant devra mettre en place les jauges de déformation, les masses, les systèmes d'acquisition avant de faire les réglages et d'effectuer les mesures de l’aile. Dès lors, ce jumeau numérique sera en mesure de produire des données expérimentales que l’apprenant exploitera par la suite pour les comparer à différents modèles. Autrement dit, le jumeau numérique est en mesure de reproduire les mesures expérimentales avec les erreurs associées, qu’elles soient liées aux maladresses de l’apprenant ou aux incertitudes des appareils de mesures.
Pour résumer les choses, l'intérêt de la réalité virtuelle, c’est que l’apprenant est actif. La réalité virtuelle peut offrir une expérience beaucoup plus viscérale que les médias traditionnels basés sur écran. Elle peut ainsi faire appel à la mémoire spatiale de l'utilisateur, lui donner un sens de l'échelle et, dans de nombreux cas, servir d'amplificateur émotionnel et de mémoire de l'expérience. Elle touche les zones de l’expérience vécue du cerveau de l’apprenant.
3 QUESTIONS À CHRISTIAN COUSQUER, INGÉNIEUR PÉDAGOGIQUE ET MULTIMÉDIA À LA DIRECTION NATIONALE DES USAGES DU NUMÉRIQUES DU CNAM
Comment est venue cette idée de jumeau numérique d’un avion léger ?
On a commencé par un tout petit croquis avec Xavier Amandolese, directeur du département Ingénierie mécanique et matériaux et chercheur au Laboratoire de mécanique des structures et des systèmes couplés (LMSSC) :
On avait idée de commencer dans un hangar avec l’avion léger, le Zenair CH 601 UL, puis de passer à une soufflerie et/ou dans un atelier de mécanique des structures de l’aile du petit avion. Mais, très vite, la DN1, au vu des défis technologiques, a décidé de diviser le projet global en projet distincts, chacun avec leurs objectifs pédagogiques. C’est très intéressant, car ils ont chacun leurs particularismes propres, et même l’approche de conception et de développement est complétement différente du jumeau numérique de CAP’VR (jumeaux numériques en chimie). Autant pour le laboratoire de chimie, avec les enseignants du Cnam, nous nous sommes concentrés sur le scénario pédagogique… et la technique suivra ! La composante interactivité y était fondamentale. Pour l’avion, on doit observer des phénomènes physiques dans un environnement réaliste et voir l’invisible. Il y a une dimension de recherche fondamentale en développements très complexe en réalité virtuelle. On s’est donc concentrés sur la technique… et le scénario pédagogique suivra ! C’est diamétralement l’inverse !
Lire la suite de l'entretien avec Christian Cousquer
Quels avantages les apprenants vont-ils tirer de ces nouveaux modules en termes de qualité d’apprentissage ?
Comme pour nos auditeurs de l’unité d’enseignement AER108 « Aérodynamique de l’aile », la réalité virtuelle permet de vivre, de visualiser et de rendre tangibles mentalement des concepts mathématiques très complexes. Elle améliore par ailleurs l’engagement et réduit la rétention de l’information en permettant aux auditeurs de vivre les concepts directement. Elle touche l’expérience vécue de l’apprenant. Je prends toujours l’exemple de Nicolas Alferez, Simon Marié et Antoine Legay, enseignants-chercheurs au département Ingénierie mécanique et matériaux, à qui on présente une simulation d’écoulement lambda de fluides sur écran. Comment sont-ils capables de dire directement : « Oui, mais là ce n’est pas crédible scientifiquement, le nombre de Reynolds n’est pas juste, c’est du Pixar ! ». Ils ont un « regard formé » par leur expertise de haut niveau et leur expérience ! Nos jumeaux numériques ont cette finalité, tout simplement.
Les avantages de la formation immersive incluent aussi la réduction des coûts, la diminution des risques, la possibilité de répéter les scénarios à l’infini et un apprentissage plus attractif grâce à la gamification (introduction de mécanismes de jeu dans les processus d'apprentissage). Pour maximiser les bénéfices de la réalité virtuelle, une conception pédagogique rigoureuse est nécessaire. Les formateurs doivent adopter de nouvelles approches et devenir des facilitateurs d’expériences, aidant les apprenants à naviguer dans les mondes virtuels. Cela nécessite de nouvelles compétences en facilitation, conception d’expériences, coaching, gamification et utilisation des outils d’analyse.
Comment le Cnam est-il devenu le champion universitaire des jumeaux numériques en réalité virtuelle ?
Nous restons humbles, car le terme « champion » est un bien grand mot. Je vois tellement de choses merveilleuses dans d’autres universités anglaises ou américaines, mais c’est vrai que l’on commence à avoir une certaine visibilité et que l’on a « un coup d’avance » par rapport à d’autres, par le fait que l’on déploie ce type de formations immersives depuis quatre ans maintenant. Plus de 450 auditeurs ont été formés grâce à ces technologies immersives. On est en phase de pré-industrialisation de ses nouveaux usages alors que la majorité en France sont en simple phase exploratoire. Pour répondre à votre question, on y a cru dès 2018 et on a bénéficié d’un engagement formidable de nos enseignants. Ils sont la clef de cette réussite !
2 décembre 2024
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